dimanche 27 mai 2012

Sur la route - Walter Salles


Cela faisait plus de 20 ans que je guettais (enfin) la mise en scène de l'un des romans cultes: "Sur la route" de Jack Kerouac, l'auteur phare de la Beat Generation.
Synopsis:
Au lendemain de la mort de son père, Sal Paradise, apprenti écrivain new-yorkais, rencontre Dean Moriarty, jeune ex-taulard au charme ravageur, marié à la très libre et très séduisante Marylou.
Entre Sal et Dean, l’entente est immédiate et fusionnelle. Décidés à ne pas se laisser enfermer dans une vie trop étriquée, les deux amis rompent leurs attaches et prennent la route avec Marylou. Assoiffés de liberté, les trois jeunes gens partent à la rencontre du monde, des autres et d’eux-mêmes; sur la route.
Ma note:
Ma critique:
Plus de 60 ans après l'écriture du livre, "Sur la route" est enfin adapté à l'écran malgré de multiples scénarios et promesses d'illustres acteurs et réalisateurs, qui se sont tous confrontés à la dure réalité économique, à savoir celles des Majors, conscients de la difficile rentabilité et adaptabilité d'une telle œuvre.
Et on ne peut le nier, surtout dans notre époque si matérialiste. C'est d'ailleurs un paradoxe frappant sur ma passion pour les écrivains Beatnik. Je n'ai jamais vraiment compris comment ils pouvaient partir à l'inconnu sans savoir comment sera fait demain, et surtout, comment sera financé le lendemain. Et cette insouciance m'a toujours fasciné. J'ai lu la grande majorité des livres de Kerouac et de Burroughs (même ses infames cut-up!) durant ma jeunesse. Je ne pouvais donc rater ce film, ni d'épancher ces quelques mots. Walter Salles réalise sans doute l'un de ses plus grands rêves de cinéphile et je l'en remercie pour son courage et sa ténacité d'avoir pu convaincre MK2 (producteur et distributeur français) pour avoir financer ce film (vive l'exception française...). Ce film n'est pourtant pas un grand film mais il a le mérite d'exister et de ne pas corrompre l'oeuvre originale. Pourtant, comme le dit le personnage d'Old Bull Lee (donc mon cher et vénéré William Burroughs) dans le film: "traduire, c'est trahir". Il y a donc forcément une forme de trahison dans cette adaptation, mais c'est une trahison par amour, que l'on pardonnera.
Son film suit assez bien le rythme décousu du livre, faits de flux ininterrompus de texte tel le ruban d'asphalte de la route 66, entrecoupés de pauses contemplatives, et d'explosions et d'accélérations captivantes.
Le film reprend également parfaitement ce sentiment de vacuité dans l'âme de Jack Kerouac, qui semble vouloir retrouver les guides de son enfance, son grand frère perdu à la guerre, et de son père, qu'il vient de perdre. Il poursuit le regard enflammé de Dean Moriarty qui irradie toutes les âmes perdues sur son passage. Le style est à la fois contemplatif et désabusé: Walter Salles filme plus le paysage qui défile, que les acteurs. Et il nous projette des paysages sans réelles âmes, mais qui occupe l'esprit de nos héros. De nos jours, nous pouvons nous abrutir devant la télévision, eux, c'était le spectacle défilant derrière la pare-brise et la promesse de trouver d'autres gens, comme eux, avides de vouloir remplir ce vide et de trouver un sens à leurs vies.
Cette soif insatiable est parfaitement incarnée par le trio d'acteur. A noter qu'avant de se lancer dans le film, Walter Salles a réuni toute son équipe d'acteurs dans un Beatnik Camp de 3 semaines, rythmés de lectures et de débats sur les oeuvres de tous les personnages mythiques que l'on retrouve dans le film: Kerouac, Cassidy, Ginsberg, LuAnne, Hinkle et évidemment Burroughs, incarné de manière exceptionnelle par Viggo Mortensen.
C'est surtout l'interprétation de Garrett Hedlund que l'on retient. Mon Dieu que Garrett Hedlund est impressionnant: son regard de chien fou vous irradie de bonheur: il vous donne de suite envie de le suivre jusqu'au bout du monde. Sans avoir les autres films en compétition à Cannes, on peut dores et déjà dire qu'il sera dans le short-list du meilleur acteur (voir pour l'Oscar l'an prochain); dommage que sa voix française soit le cliché hollywoodien du beau sombre ténébreux à la voix rocailleuse.
Mis à part ce détail sonore, c'est un plaisir de voir ces acteurs incarner le livre culte de plusieurs générations, celle qui vous rappellent que les études et les livres ne vous apprendront jamais à réaliser vos rêves. Jettes ton livre, ton smartphone et ton PC et lances-toi dans la vraie vie, si tu souhaites être de ceux exister et apprendre des autres et surtout, de soi-même.
Crédits:
  • Réalisation: Walter Salles
  • Pays: France / Brésil
  • Durée: 2H17
  • Acteurs Principaux: Garrett Hedlund, Sam Riley, Kristen Stewart, Tom Sturridge, Kirsten Dunst, Viggo Mortensen, Amy Adams, Danny Morgan, Alice Braga, Elisabeth Moss, Steve Buscemi et Terrence Howard
  • Production: Nathanaël Karmitz, Charles Gillibert, Rebecca Veldham, Roman Coppola, Francis Ford Coppola, John Williams, Jerry Leider et Tessa Ross, Arpad Busson
  • Scénario: Jose Rivera, d’après le roman de Jack Kerouac

Quelques liens:
Affiches secondaires:
Viggo Mortensen as William Burroughs Garrett Hedlung as Neal Cassidy
 

mercredi 16 mai 2012

ANATHEMA - Weather Systems


ANATHEMA Weather SystemsANATHEMA Weather Systemsma note
Jusqu'ici Anathema me laissait de marbre: je n'accrochais pas à leur rock atmosphérique; je trouvais leurs mélodies trop subtiles et pas assez prenantes, voire ennuyantes.
Il aura fallu donc attendre leur neuvième album pour enfin me ravir avec, après mures reflexions, l'un des plus beaux albums de ces 10 dernières années.
Weather Systems est une sorte de concept album, qui ne parle pas des dérangements climatiques et autres menaces écologiques (comme on pourrait le croire), mais du déchirement des sentiments qui nous poussent au plus profond, vers un sentiment de perte de soi, de mort de l'âme... Le dernier morceau tourne d'ailleurs autour de l'expérience de NDA (Near Death Experience).
On pourrait croire que du coup, Anathema nous plonge dans une torpeur mélancolique moribonde mais curieusement, non. Cet album baigne paradoxalement dans une atmosphère mélancolique positive: la mélodie, les chants et les instruments se tournent peu à peu vers la lumière pour nous donner un véritable bain de soleil.
Le plus bel exemple est le diptyque "Untouchable", qui commence par une atmosphère sombre et froide, et où peu à peu les voix s'éclaircissent, le rythme s'intensifie et la détresse du chant se transforme en énergie positive à faire déplacer des montagnes, et surtout, à faire battre fort votre coeur.
Les familles Cavanagh et Douglas qui composent le groupe sont en parfaite harmonie, surtout que la petite sœur Douglas vole désormais de ses propres ailes et chantent presqu'autant que Vincent Cavanagh. Sa voix douce apporte énormément à l'élévation du style d'Anathema vers un rock-prog enfin transcendant, hypnotique et majestueux.
Il vous suffit d'écouter les 2 première minutes du morceau ci-dessous (The Beginning And The End) pour comprendre cette montée en douceur et cet envol vers des cieux d'une clémence absolue.
Anathema est enfin au sommet de son art: Weather Systems est tout simplement un régal pour les oreilles, voire même une cure de jouvence pour votre âme de mélomane...
La track-list
  1. Untouchable Part 1
  2. Untouchable Part 2
  3. The Gathering Of The Clouds
  4. Lightning Song
  5. Sunlight
  6. The Storm Before The Calm
  7. The Beginning And The End
  8. The Lost Child
  9. Internal Landscapes
Ecoute:

Quelques liens:

mercredi 2 mai 2012

Martin HIRSCH - Secrets de Fabrication


Secrets de Fabrication En cette période d'élections présidentielle, je me suis laissé tenté par le livre de Martin Hirsch, que j'avais acheté il y a 2 ans et laissé de côté.
Résumé:
Martin Hirsch est entré en 2007 dans le gouvernement de François Fillon, à la demande de Nicolas Sarkozy, avec le titre de 'Haut Commissaire' enfin de valider les bienfaits du revenu de solidarité active (RSA) et le mettre en application.
Comment passer de la présidence d'Emmaüs au gouvernement de Nicolas Sarkozy sans se renier?
Il raconte ici les péripéties de ce contrat improbable entre un Président de droite et un militant associatif de gauche. Il explique comment il s'efforce de mettre en œuvre des politiques ambitieuses sans être 'un homme politique'. Se projetant dans l'avenir, il développe ses idées et ses projets, et démontre avant tout qu'il faut être pragmatique, si on veut qu'une idée politique puisse se concrêtiser en action, et en résultats!
Ma note: ma note
Le livre de Martin Hirsch est plus une chronique de 3 ans passés au gouvernement qu'une propagande de contenu politique. Il nous narre son parcours d'anecdotes, d'embûches et des principales discussions et actions qui ont amené à mettre en oeuvre le RSA, le Revenu de Solidarité Active.
C'est en fait surtout un authentique portrait de ce qu'est la politique d'aujourd'hui, où nos politiques sont bien plus intéressés par la prolongation de leur mandat, des résultats à courts termes que la mise en place de réformes profondes et d'actions qui se mettent en place sur plusieurs années.
Martin Hirsch est certes un homme de gauche, mais c'est urtout un homme pragmatique, qui comprend que la libre motivation est un moteur bien plus efficace que l'assistanat; mais que l'Etat se doit de n'abandonner personne, sans se lancer dans les belles promesses de la Droite et de la Gauche. C'est un homme qui s'est engagé dans le gouvernement Sarkozy pour tester, valider et mettre en place une idée à laquelle il croit dur comme fer et a su évité de perdre son temps en politique politicienne.
Et son seul travers politique qu'on peut lui reprocher sur ces 3 années passées au gouvernement, c'est de s'être ouvertement défausser aux questions trop politiques...
Il n'épargne d'ailleurs ni ses amis de gauche que ses ennemis de droites. Le portrait qu'il dresse de nos hommes politiques est en fait assez désopilant et pathétique. Il n'y va d'ailleurs pas de mains mortes entre ces ministres de droites qui se détestent les uns les autres, et il est même incisif contre ces "amis" socialistes bien-pensants, bien plus sectaires (voire réactionnaires), réfutant systématiquement la moindre idée provenant de la droite...
En finalité, la chronique de Martin Hirsch est passionnante, même si on en ressort dégouté par l'énergie gaspillé par les décisions politiques éphémères et l'univers kafkaïens des administrations françaises. Son plaidoyer pour l'expérimentation "à grande échelle" est fort instructive, car c'est bien le seul moyen de valider qu'une idée théoriquement géniale est concrètement bonne. Dommage qu'il ait fallu près de 40 ans à la Cinquième République pour que le concept d'expérimentation économique et sociale puisse se mettre en place...