Ma critique:
Avec "Kennedy's brain", c'est le deuxième livre d'Henning Mankell où l'action se passe en majorité en-dehors de Suède. Jusqu'ici, les livres d'Henning Mankell restaient principalement focalisés sur la société suédoise et sur ses pertes de repères, comme le déplorait son illustre inspecteur Wallander. Depuis que l'auteur vit en Afrique (Mozambique), Henning Mankell mondialise ses personnages et les fait donc parcourir le monde. Avec ce "The Man from Beijing", nous allons sur 4 continents: l'Europe, l'Asie, l'Amérique et enfin l'Afrique.
Ce livre aborde également des thèmes économiques et politiques sensibles sur la situation du continent Africain que "le cerveau de Kennedy" abordait à peine... Henning Mankell nous délivre sa première œuvre versatile, où l'intrigue policière se mêle à l'histoire et à la géo-politique.

Tout commence donc par la macabre découverte de ce massacre dans un hameau perdu au nord de la Suède. L'intrigue est donc dès le début captivante et change des petits meurtres suédois de l'inspecteur Wallander. On ne sait pas trop à quoi s'attendre et l'entrée en scène dans l'enquête de la juge Birgitta Roslin déroute un peu... Ce n'est pas des plus crédible mais paradoxalement, nous sommes plongés dans cette intrigue tortueuse ne tenant qu'à un fil, ou plus exactement, qu'à un ruban rouge.
Et d'un coup, nous voilà plongé dans un manuscrit vieux de 130 ans nous narrant l'histoire d'une fratrie chinoise qui va traverser à pied (par) la Chine pour enfin parcourir le monde et revenir dans leur contrée millénaire.

Henning Mankell déstabilise son lecteur en mêlant 2 points de vue radicalement différent; celui de la juge et de l'homme d'affaire chinois, et leur passé respectif; qui semble être le lien du massacre. On comprend d'ailleurs assez vite ce mobile mais on se demande où va nous mener l'auteur: que pourra faire la juge, quelle preuve pourra-t-elle avoir et cela ne va-t-il pas finir en queue de poisson comme le "Kennedy's brain".
Et bien non. Le message est en fait ailleurs, et très politique. Je mettrai donc de côté les facilités scénaristiques avec lesquelles l'auteur s'amuse pour faire venir Madame la juge en Chine et trouver en quelques heures les bonnes personnes. C'est léger et cela risque d'horripiler plus d'un lecteur. Mais bon, nous sommes embarqués dans le flux et cette intrigue versatile qui nous laisse présager d'un message plus important

La partie finale est pleine de surprises et en fait très géo-politique. En effet, il dénonce le comportement néo-colonisateur de la Chine sur tout le continent Africain. Même s'il modère ses propos en nous dévoilant des dissensions importantes au sein du parti communiste chinois, les faits historiques et présents sont là.
La Chine a depuis plus de 50 ans un véritable problème de sur-population accrue par un manque d'auto-finance alimentaire. Henning Mankell nous expose sa vision politique qu'en effet, cette surpopulation rurale est une menace pour l'équilibre de la société chinoise, avec ces 200 millions de paysans qui ne cessent de s'appauvrir, et qui risquent, un jour, de se révolter. Et que ce risque explique les bataillons d'ouvriers et de paysans chinois qui sont envoyés en Afrique, en coopération. Mais en fait, leur déportation est en tant que véritable extracteur de la richesse locale: la terre agricole. Henning Mankell dénonce cette politique coloniale édulcorée qui risque au final d'être pire que la colonisation européenne des siècles derniers. Il met en avant également que le gouvernement chinois atteint plusieurs objectifs en un seul coup: à court terme, la problématique de la diminution de la population en Chine ainsi que l'augmentation rapide et assurée de nouvelles ressources alimentaires; et à long terme la mise à bas de toute tension velléitaire au sein de la Chine.
L'épilogue du livre se termine quand même sur l'intrigue initiale, où là encore, l'auteur se laisse aller à quelques facilités de roman de gare; ce qui est un peu dommage.
Heureusement que le message politique nous fait oublier ces quelques maladresses.

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