Ma note: ma note
Remarque: Lu en espagnol
Ma critique:
Cela faisait plus de 15 ans que je n'avais pas lu un livre en langue espagnole, et à part quelques articles sur www.marca.es pour suivre les déboires du club de foot de Cadiz, je ne me sentais pas prêt à lire ce cadeau empoisonné.
Mais bon, c'était un de mes défis avant mon passage de la quarantaine et j'y suis arrivé. Et ce fut nettement plus simple que je ne le pensais.

En fait, à part quelques descriptions détaillées des carrosses, diligences et vêtements des espagnols, les lettres d'Alexandre Dumas sont plus écrits sur le vif, tel un journal de bord, et donc très facile d'accès; et au bout d'une cinquantaine de pages, ce fût un régal.
Et un régal dans tous les sens du terme: la joie de ré-apprivoiser une langue que j'adore, de voir qu'une culture après 2 siècles gardent ces mêmes particularités et enfin, le style enjoué, jubilatoire et facétieux des lettres d'Alexandre Dumas. C'est drôle, mais j'avais l'impression que les quelques expressions traduites par ... étaient typiquement des tics de langages de la grandiloquence de mes amis de Cadix!!!

Mais revenons au livre. Alexandre Dumas raconte donc de façon rocambolesque son voyage, en débordant parfois un peu sur la réalité. Alexandre Dumas est un véritable boute-en-train Dumas qui se joue parfois des préjugés, en les enfonçant d'abord de manière assez corrosif, puis en les sortant hors de l'eau pour leur trouver toutes les qualités. C'est presque un voyage picaresque, à la différence que lui et ses compères vivent dans l'exubérance: ils surnagent dans ce flos de difficultés (routes, diligences, auberges insalubres), méprisant le danger (les voleurs), et restent des gentlemen épicuriens en chaque instant comme si, finalement, tout est dérisoire...
Faut dire que l'humilité et la modestie d'Alexandre Dumas sont aussi fines qu'un cumulo-nimbus: c'est un peu Dieu sur Terre, connu de par le monde grâce à ses livres. Il taille donc en pièce les quelques différences culturelles de l'Espagne avec la France: ses douaniers, ses routes, les coutumes vestimentaires, les moyens de locomotion (que des mules et mulets!) et surtout ses fameuses auberges. Les histoires liées aux auberges espagnoles sont hilarantes et on comprend mieux l'origine de cette expression. En effet, Alexandre Dumas nous explique que les auberges n'ont rien d'hospitalière (courtoisie, qualité, repas), et que si vous n'apportez pas vous même votre nourriture, couverts, draps et bonne humeur, vous ne passerez pas une bonne soirée, et encore moins une bonne nuit; et que c'est donc à vous d'en faire un lieu agréable.

Le témoignage de l'auteur est donc très facétieux et burlesque mais sans méchanceté aucune, et donne vraiment envie de faire partie du voyage. Il se moque plus de ses compagnons de voyages, son homme à tout faire qui se révèle plutôt un homme bon à rien faire; son ami peintre qui s'extasie devant tout, et même son fils, qui passe son temps à dormir où à trouver des belles damoiseaux... Son récit de la corrida est passionnant et relate très bien l'aspect addictif et envoutant de cette mise en scène "barbare". Ce chapitre vaut le détour!
Autre chose passionnante est de voir que quelques us et coutumes restent typiquement castillanes: le manque de détail des additions, la pudeur des andalouses où il faut 18 mois minimum pour espérer leur baiser la main; la magie des danses sévillanes, à la fois terriblement orgasmique et pudiques; et cette façon dont les andalous aiment s'habiller: reprendre les aspects chics de différentes modes vestimentaires, mais d'en faire au final un patch vestimentaire très coloré incongru, voire de mauvais goûts (comme toutes ces "putitas gordas" habillées de bottes de motos, mini-jupe, botte et pull coloré que l'on peut croiser en Andalousie). Bref, près de 2 siècles plus tard, cela fait plaisir de constater qu'outre les us et coutumes, une certaine mentalité reste dans les

Pour finir, on regrettera que le nombre de pages sur Séville et Cadix soient si peu nombreuses, mais cela est vrai que toutes les surprises et différences du culture ont été développées dans tout le reste du livre.
Chose étonnante sur Cadix, c'est que la description de la ville reste la même aujourd'hui: avec d'un côté une ville à part avec des maisons hautes, des rues sans fins qui débouchent sur un bleu infini fait de ciel et de mer et une cathédrale grossière. Et de l'autre, une gaieté dans la mentalité des gens (ces gens sont si contents, si joyeux de vivre qu'on se demande s'ils ne sont pas, en fait, sans cesse dans le besoin de se rassurer qu'ils vivent biens et heureux), et surtout, surtout, un sentiment d'apprécier cette ville sans savoir pourquoi, simplement le fait d'y être et puis c'est tout!. C'est exactement mon ressenti envers cette cité que j'adore. Elle n'est pas vraiment belle, mais elle a ce charme envoutant qu'y fait qu'on s'y sente bien de suite.

Quelques liens: